Gérer l’après-cancer : rencontre avec l’illustratrice BD Alice Baguet

Gérer l’après-cancer : rencontre avec l’illustratrice BD Alice Baguet

Crédit Photo : Benoît Desprez

Après avoir parlé de son cancer, alias Jean-Pierre, dans « L’année du crabe », Alice Baguet vient nous surprendre en librairie avec ce qu’on pourrait appeler la suite, « Après l’année du crabe : en attendant la récidive » (Editions Vraoum!). Roster Con est allé à la rencontre de cette jeune femme pleine d’humour qui nous raconte avec beaucoup de sincérité comme elle en est venue à écrire ce nouveau volet.

Roster Con : Dans le premier tome, « L’année du crabe », vous évoquiez votre cancer, Jean-Pierre. On ne vous attendait pas avec une nouvelle bande dessinée sur la rémission. Qu’est-ce qui vous a décidé à faire une suite ?
Alice Baguet : En faisant le tome 1, j’avais mis de côté des « morceaux de vécu » qui ne cadraient pas avec ce que je voulais y raconter. J’ai vite réalisé que tous ces morceaux étaient du vécu « post cancer » et que ça pourrait être le début d’un autre livre. Mais il aura fallu beaucoup de boulot, beaucoup d’encouragements de la part de mon éditeur, et un peu de temps pour faire de ces morceaux une histoire avec un propos. En ayant terminé ce deuxième tome, je réalise que le premier était une porte d’entrée pour pouvoir parler d’un sujet beaucoup moins discuté que le cancer : l’après cancer.

J’ai remarqué que comme sur le premier, les personnes les plus déstabilisées par ces propos sont rarement des malades ou ex-malades.

Vous abordez avec beaucoup d’humour le fait de se réadapter à une vie « normale ». Pensez-vous que votre BD pourrait choquer ceux qui sont malades ?
Je me suis posé beaucoup de questions à l’écriture, parce que certaines vannes, certaines formules me venaient assez vite et me plaisaient, mais dans un second temps je m’interrogeais sur les limites. La « solution » s’est présentée toute seule, quand l’idée d’avoir un alter ego a émergé. Avoir un double dans le livre me permet justement de contrebalancer mes propres vannes. C’est très cash, mais je dis aussi que j’ai pleinement conscience de l’absurdité où la dureté de ce que je dis, tout en ayant quand même très envie de le dire. Et j’ai remarqué que comme sur le premier, les personnes les plus déstabilisées par ces propos sont rarement des malades ou ex-malades. Eux se retrouvent dans des anecdotes, dans des moments, et s’attachent la plupart du temps à ce qui relie nos histoires plutôt qu’à ce qui les différencie.

Qu’est-ce qui a été le plus dur dans l’écriture de ce second volet ?
Premièrement prendre du recul : le tome 1 a été écrit 10 ans après la maladie, j’avais pris le temps de réfléchir, de construire, de structurer mes souvenirs avant même de me mettre à écrire à proprement parler. Là j’ai su que je pouvais faire un tome 2 le jour où le tome 1 est sorti en librairie, parce que ce jour là j’ai compris beaucoup de choses sur moi. Mais c’était il y a seulement 2 ans. Et passer de ce constat à une histoire, un univers graphique et un propos construit, c’était beaucoup de boulot d’analyse, de tri et d’écriture. Deuxièmement, il a fallu assumer, tout au long de l’écriture mais aussi du dessin, le fait que c’était 100 fois plus personnel et intérieur que le premier. Justement parce que j’en ai beaucoup moins parlé. À un moment, j’ai même pensé « Non mais ma cocotte, de quel droit tu décides que ton auto-psychothérapie mérite d’être publiée ? ». Et puis bon, j’avais déjà bien avancé alors je suis allée au bout, et mon éditeur a soutenu, ce qui m’a bien aidée. J’ai placé « tu t’es crûe chez le psy ou quoi? » quelque part dans la BD et ça a suffit à me déculpabiliser ! Finalement j’ai l’impression que plus il y a de détails et plus ça permet au lecteur, même celui qui n’est pas concerné par la maladie ou l’après maladie, de se retrouver dans un petit truc, une attitude, une réflexion, une réaction et de s’attacher à l’histoire.

Avez-vous des projets bullesques dans les cartons ?
J’ai le projet de parler d’autre chose déjà. Le cancer, on arrête. C’est encore à l’état d’idées plus que de projets mais j’ai repris le travail, j’explore un peu quelques pistes pour voir si ces embryons d’idées sont viables… J’aimerais bien aussi avoir l’occasion de partager un projet avec un scénariste (en tant que dessinatrice, donc) ou un dessinateur (cette fois en tant que scénariste).

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Publié le 24 octobre 2017
Dernière mise à jour le 2 janvier 2022

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